mardi 22 juillet 2014

Autour de la réforme des Procédures Collectives: Season Finale

Titre-clin d'oeil à mon premier article sur le sujet, voici donc le dernier article de cette première saison de la réforme des Procédures Collectives, qui concernera une innovation crée en faveur de l'entrepreneur individuel:  Le Rétablissement Professionnel.

Plusieurs conditions pour pouvoir en bénéficier :

-         -  Etre une personne physique donc
-         - Avoir un patrimoine professionnel séparé du personnel (donc avoir adopté le statut d’EIRL)
-          - Ne pas avoir de salarié depuis moins de 6 mois
-          - Avoir un actif déclaré limité (montant déterminé via décrêt: 5.000 Euros)
-          - Ne pas faire l’objet d’une procédure collective
-          - Et ne pas avoir fait l’objet d’une Clôture pour insuffisance d’actif ou pour rétablissement professionnel les 5 années précédant l’ouverture du rétablissement professionnel.

Seul le débiteur peut saisir le Tribunal ; celui-ci statue sur la demande sur avis préalable du Ministère Public.

En parallèle de la demande de Rétablissement Personnel, une demande d'ouverture de Procédure de Liquidation Judiciaire doit être faite afin que le Tribunal soit en mesure d'orienter le dossier vers l'une ou l'autre de ces issues,

Un juge commis est désigné, assisté d’un mandataire judiciaire, pour encadrer la Procédure.

La durée de la procédure est de 4 mois, qui consiste en une phase d’enquête : les conditions d’ouverture sont-elles réunies ? le débiteur ne devrait-il pas faire l’objet d’une liquidation judiciaire ?

Le mandataire sollicite les créanciers connus pour connaître le montant de leur créance et les invite à répondre dans les 2 mois.

Attention, il ne s’agit pas là d’une déclaration de créance; les obligations et contraintes existantes en matière de déclaration de créances ne se retrouvent donc pas ici.

De la même façon, il n’y a pas d’arrêt des poursuites, même si le juge commis peut la décider, sur demande du débiteur.

La principale conséquence de la procédure de rétablissement est l’effacement des dettes pour la personne concernée ; encore faut-il préciser quelles sont ces dettes :

-          - Celles antérieures à l’ouverture de la procédure
-         -  Portées à la connaissance du juge commis et ayant fait l’objet d’une information au créancier
-          - A l’exclusion de certaines dettes, notamment de type alimentaires et des salariées
-          - Visées par l’ordonnance de clôture


La mise en liquidation judiciaire peut intervenir dans le courant de la procédure , notamment si dans le cadre de la phase d'enquête, il est constaté que le débiteur doit se voir appliqué ce régime et non le rétablissement professionnel.

Par ailleurs, malgré l’ordonnance de clôture, une liquidation judiciaire peut être ouverte postérieurement, les créanciers dont les dettes ont été effacées recouvrent leurs droits et n’ont pas à effectuer de déclaration de créances.

Réforme des Procédures Collectives, Episode 7: La Liquidation Judiciaire

Avant dernier article examinant le détail de la réforme entrée en vigueur, nous nous penchons aujourd'hui sur les modifications impactant ou pouvant impacter le créancier/fournisseur dans le cadre d'une Liquidation Judiciaire.

Deux points sont à relever:

- D'une part une précision qui nous est désormais apportée par l'ordonnance et transposée à l'article L641-13 du Code de Commerce, afin de définir les créances postérieures qui sont réglées à échéance et/ou deviennent privilégiées à défaut de règlement.

Il s'agit de 3 catégories de créances:

1/ celles qui sont nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé.
2/ celles qui sont nées en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant le maintien de l'activité ou en exécution d'un contrat en cours décidée par le liquidateur ;
3/ celles sont nées des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique.
Par rapport à l'ancienne définition du même article, un nombre plus conséquent de créances sont couvertes, ce qui va dans le sens d'une meilleure protection du créancier postérieur.

Il ne faut néanmoins pas être naïf sur la portée réelle de la réforme: dans le cadre d'une liquidation judiciaire, le créancier postérieur, même avec son privilège, s'il n'est pas réglé à l'échéance, a peu de chance de l'être dans le cadre de répartitions issues de cession de l'actif.


- D'autre part, une accélération certaine de la procédure de Liquidation Judiciaire, notamment au niveau de la clôture de celle-ci, ce qui va intéresser au plus au point les créanciers et les gestionnaires recouvrement.

En effet, jusque-là, il fallait attendre la liquidation totale du patrimoine du liquidé ou la fin des actions judiciaires en cours pour que la clôture de la procédure.

Si le jugement d'ouverture de la Liquidation Judiciaire permettait au créancier de récupérer la TVA, seule la clôture permettait le passage en perte (hormis bien sûr obtention auparavant du certificat d'irrecouvrabilité)

Désormais la situation est différente, du moins est-ce la volonté du législateur: En effet, le Tribunal pourra prononcer la clôture même si des actifs résiduels subsistent, dans la mesure où ceux-ci posent difficultés dans le cadre de leur réalisation.

De la même façon la clôture pourra être prononcée alors que des instances seront toujours en cours ; un mandataire (le liquidateur selon toute probabilité, même si le texte est muet sur ce point) sera nommé pour assurer le suivi desdites instances, charge à lui de répartir les éventuels fonds issus de celles-ci.

La durée des liquidations judiciaires devrait de ce fait être raccourcie de façon assez conséquente, les obstacles à la clôture une fois l'essentiel du processus de cession des actifs étant par cette réforme désormais levés.

vendredi 11 juillet 2014

Un peu d'autopromotion

Petite pause dans la série en cours des principales modifications apportées par la réforme des Procédures Collectives, puisque ce matin j'ai reçu le nouveau catalogue IFOR


L'IFOR est l'organisme de formation de l'IFEC, lui même syndicat des professions comptables.

Dans le cadre de leur nouveau catalogue, l'IFOR a choisi de me confier une formation ayant pour objectif de permettre aux experts comptables qui la suivront de développer leurs missions de conseil sur le poste clients.



Je tenais à remercier la commission formation pour son écoute, sa disponibilité et son esprit critique dans le cadre de l'élaboration de ce programme.

 Tout mes remerciements en particulier à Stéphane Bellanger, Lionel Escaffre, Raphaël Serougne et Nadine Thuleau. 

lundi 7 juillet 2014

Autour de la réforme, Episode 6: La déclaration de créance

Sixième volet de cette série d'articles sur la réforme des Procédures Collectives, qui s'intéressera donc à la déclaration de créance, fortement remaniée par l'ordonnance du 12 mars 2014.

Tout commence lors de l’établissement de la liste des créanciers.

Le débiteur, en l’établissant, et en mentionnant tel ou tel créancier, est présumé agir pour le compte dudit créancier, ceci tant que ce dernier n’a pas établi sa propre déclaration (L622-24 Code de commerce).

Une disposition identique existe pour les créances postérieures « privilégiées ».

On le voit: le créancier, quelle que soit l'origine de sa créance (antérieure ou non, chirographaire ou privilégiée), se voit "protégé" par l'action du débiteur.

Encore faudra-t-il apprécier in situ les effets de cette partie de la réforme.

Un risque existe en effet dans le cadre de certaines procédures: on peut en effet craindre que cela incite le débiteur à "oublier" certains créanciers ou certaines factures, en tablant sur un oubli de déclaration de créances, ceci afin de minimiser la masse des sommes dues au titre de la Procédure. 

La forme de cette déclaration pour le compte du créancier reste floue, ou large diront certains, puisque le décret d'application du 30 Juin 2014 n'est pas venu vraiment éclairer la volonté des auteurs du texte initial.

Si on essaie de synthétiser néanmoins:

- Le débiteur a 8 jours pour déposer la liste des créanciers auprès du mandataire judiciaire; rien de neuf sous le soleil dira-t-on; mais les obligations qui pèsent sur le débiteur au niveau de l'information restituée au mandataire sont désormais beaucoup plus importantes: montant échu et à échoir, modalité de calcul des intérêts de retard, nature du privilège ou de la sûreté attachés à la créance,...ce qui la rapproche fortement d'une déclaration de créance

- Toutefois, il est précisé que le débiteur a un délai de 2 mois pour déclarer les créances au même titre que le créancier (article R622-24 Code de Commerce)

Dès lors, si on adopte une position favorable au créancier, on peut déduire que la déclaration "pour compte" émanant du débiteur pourra prendre deux formes: soit par le biais de la liste des créanciers, soit par le biais d'une déclaration en bonne et due forme.

De la même façon, la ratification de la déclaration est instaurée (L622-24 CCom Nouvelle Rédaction); quelle hypothèse couvre cette ratification ?

Il s’agit d’une déclaration qui aurait été faite par un mandataire (extérieur ou pas à l’entreprise déclarante) : celle-ci pourra être ratifiée par l’entreprise et ce jusqu'à l’admission par le juge commissaire.

Les rédacteurs ont voulu réduire à néant (du moins l'espère-t-on en pratique) un contentieux assez artificiel mais relativement important dans les faits sur le pouvoir/mandat de la personne déclarant la créance.

C'était là une objection qui était devenue relativement classique pour rejeter une déclaration de créance, générant en aval un contentieux qui encombrait le Tribunal et le juge commissaire chargé de la Procédure Collective en question.

De même, le débiteur a l’obligation d’informer son créancier dans les 10 jours de l’ouverture de la PC dans le cadre d’instances en cours.

La réforme vient également modifier le relevé de forclusion.

Celui-ci est facilité par l’ordonnance du 12 mars, sur plusieurs plans :

-    Sous le régime antérieur, le créancier « oublié » devait prouver l’omission volontaire du débiteur dans la liste des créanciers ; le qualificatif « volontaire » étant supprimé à partir du 1er Juillet, la preuve sera plus facile à administrer dans le cadre d’un relevé de forclusion.

-    Sur le délai d’action : si celui-ci n’est pas modifié (6 mois), il sera également applicable pour les créanciers ignorant l’existence de leur créance.


De même, il est précisé que le créancier aura un mois à compter de l’ordonnance le relevant de la forclusion pour déclarer sa créance.

Ajoutons pour être relativement complet et conclure 2 nouveautés liées à la déclaration de créance:

La déclaration de créance interrompt le cours de la prescription jusqu’à la clôture de la Procédure (L622-25 CCom Nouvel article) : il s’agit là d’une disposition visant à clarifier la situation de la créance au regard du cours de la prescription, clarification qui avait déjà été posée par la Jurisprudence.

- Un délai de 30 jours est fixé pour le débiteur afin de faire part de ses observations/contestations sur les créances déclarées (L621-4 CCom Nouvelle rédaction) : il s’agit d’instaurer un délai équivalent à celui que supporte le créancier dans le cadre de la contestation de créance

vendredi 4 juillet 2014

Autour de la Réforme, Episode 5: La continuation des contrats en cours

Consacrer un article entier à ce sujet semble démesuré rapporté à la globalité de la réforme des Procédures Collectives.

Néanmoins, il s'agit d'une modification qui aura une conséquence importante dans la relation fournisseur (qui est souvent  également créancier antérieur) / client (autrement dit l'entreprise en Procédures Collectives), et c'est la raison pour laquelle je souhaitais la mette en exergue.

La réforme vient en effet supprimer, dans le cadre de la sauvegarde, l'obligation de paiement au comptant des factures postérieures au jugement d'ouverture pour l'entreprise bénéficiant de ce régime.

Auparavant, le régime était indifférencié que l'entreprise soit en sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire: elle avait l'obligation de payer ses fournisseurs au comptant.

Cela se traduit dans les faits par des pratiques assez variées: paiement avant la livraison, sur la base d'une pro format, constitution d'une provision chez le fournisseur, lettre d'engagement de l'administrateur sur le règlement de la commande...

Cette obligation disparaît donc

Cette décision a une logique qui est celle de la sauvegarde:  elle a pour but de traiter, le plus en amont possible, les difficultés de l'entreprise, qu'elles soient financières ou non.

Et c'est ce non qui a de l'importance dans l'esprit du législateur: pourquoi pénaliser une entreprise par un paiement au comptant, alors qu'elle n'est pas en difficulté financière ou - si elle commence à connaître des difficultés de Trésorerie- n'est pas en cessation de paiement ?

Cette obligation ne faisait que précipiter dans ces hypothèses l'entreprise en difficulté vers une situation encore plus dégradée.

La réforme aura donc un effet correctif par rapport aux objectifs de la sauvegarde, mais -on peut en tout cas l'espérer- également un effet incitatif.

Cette contrainte levée, un chef d'entreprise sera en effet probablement moins freiné dans sa démarche vers un processus de sauvegarde.

Il ne faut néanmoins pas faire preuve d'angélisme et constater que la sauvegarde est aujourd'hui une procédure utilisée pour des entreprises ayant d'ors et déjà des difficultés financières importantes.

Dès lors, le créancier/fournisseur se trouvera dans une situation où ses engagements en terme de dettes seront moins contrôlables que dans le cadre d'un redressement ou - Hypothèse plus rare- d'une sauvegarde.

Je préconiserai à ce stade 2 mesures permettant au créancier potentiel d'influer sur ce risque:

- D'une part, une clause permettant au niveau de ses CGV de revoir les conditions de paiement dès lors qu'un retard de règlement aura été constaté
- D'autre part, une intervention au plus vite vis à vis de l'administrateur afin qu'il se prononce sur la continuation du contrat en cours


mercredi 2 juillet 2014

Autour de la Réforme, Episode 4: La Place du Créancier

Quatrième volet de ce focus consacré à la réforme des Procédures collectives entrée en vigueur le 1er Juillet 2014, il est temps de nous intéresser au sort du créancier, qui est amélioré dans le cadre de la nouvelle législation.

L'objet de cet article sera de compiler les différentes mesures allant en ce sens, avant de nous intéresser dans un prochain article plus particulièrement au processus de déclaration de créances qui, s'il reste le même dans ses grandes lignes, est remodelé par la réforme.

Nous ne reviendrons pas sur les améliorations déjà évoquées dans le cadre des précédents articles, même s'il est utile de les citer à nouveau ici: privilège d'argent frais, mais aussi création d'un "mandataire à l'exécution de l'accord", qui constituera une garantie supplémentaire du respect et du suivi du plan.

Ce rôle accru du créancier se traduit par une mesure emblématique, même si l'appréciation de son impact devra se faire in situ:

-    Tout créancier membre d’un comité pourra désormais proposer un plan à l'approbation du Tribunal.

Si elle est symbolique, cette disposition ne doit pas en masquer une autre:

Le commissaire à l’exécution du plan pourra saisir le Tribunal si l’évolution de la situation du débiteur permet une modification substantielle au profit des créanciers.

Comment analyser cette volonté exprimée par le Législateur ?

Un constat s'impose d'abord: les priorités des Procédures Collectives ne sont pas modifiées.

Pour mémoire, l'objectif du redressement et de la sauvegarde est par ordre de priorité:

- La poursuite de l'activité de l'entreprise
- Le maintien de l'emploi
- L'apurement du passif

Les rédacteurs ont donc voulu, non pas bouleverser cet ordre des priorités, mais créer une souplesse en faveur des créanciers venant le cas échéant améliorer le volet "apurement du passif".

mardi 1 juillet 2014

Réforme des PC, Episode 3: La sauvegarde accélérée

Comme cela avait été souligné dans le précédent article, une « issue » originale est donnée à la procédure de conciliation : le passage à la sauvegarde accélérée

Le débiteur peut solliciter cette passerelle s’il justifie avoir élaboré dans le cadre de la conciliation un plan assurant la pérennité de l’entreprise, plan qui doit avoir en outre reçu un soutien assez large des créanciers de l'entreprise.

D'un simple accord entre les parties (conciliation), on aboutira donc finalement à un plan validé par le tribunal.

A noter qu'il existait dans la précédente version de la Loi sur les Procédures Collectives, une sauvegarde financière.

Désormais, celle-ci est un sous-ensemble de la sauvegarde accélérée.

Un certain nombre de caractéristiques peut être dégagé de cette nouvelle procédure, qui reste néanmoins dans le cadre législatif général de la sauvegarde.

Tout d'abord, cette procédure ne s'adresse qu'à des entreprises remplissant un certain nombre de critères de taille: au moins 20 salariés, 3 Millions d'Euros de CA HT, et un bilan d' 1.5 Millions d'Euros. 

Ensuite, la durée de la procédure est, comme son nom l’indique, assez courte (3 mois), sans possibilité de prorogation ; mais, dans l'esprit des rédacteurs, cette rapidité doit être contrebalancée par une certaine sécurisation en faveur de l'entreprise qui fait appel à ce mécanisme.

En effet, l'environnement dans lequel évolue ladite entreprise ne doit pas être bouleversé par la sauvegarde accélérée.

C’est la raison pour laquelle certaines dispositions régissant la sauvegarde classique sont écartées :

Ainsi, il n’y a pas de mécanisme d’option sur les contrats en cours; on peut donc en déduire, côté fournisseurs, que ceux-ci doivent se poursuivre en l'état antérieur à la sauvegarde.

De la même façon, il n’y a pas de possibilité de revendication de marchandises/matériels.

Il s'agit là de mécanismes potentiellement pénalisants pour le créancier/fournisseur par rapport à la procédure de sauvegarde de droit commun.

Par contre, le délai de déclaration de créances n’a pas été modifié, puisqu'il est susceptible de "tenir" dans la courte durée de la procédure.


Attention, comme indiqué précédemment, une fois le délai de 3 mois expiré, aucune prorogation n’est possible ; aucune passerelle vers d’autres procédures n’est de la même façon prévue, ce qui pourrait constituer une faiblesse de la sauvegarde accélérée.

Aucun retour en arrière et aucune issue autre que la validation du plan par le Tribunal n'est possible; le débiteur s'engageant dans cette voie devra donc évaluer ses chances de réussite a priori; d'où les barrières posées par le législateur en matière d'élaboration de plan et d'accord des créanciers.