mercredi 12 décembre 2012

Où il est conseillé de ne pas être désinvolte avec sa carte de crédit

Parmi les décisions rendues par la Cour de Cassation, certaines nous intéressent parce qu'elles concernent notre domaine d'activité.

Elles font évoluer notre réflexion, suscitent notre accord ou notre désaccord, nous font évoluer sur notre pratique quotidienne.

D'autres retiennent notre attention de par leur côté insolite, ou leur fort rattachement à notre quotidien.

Ces deux caractères ne sont d'ailleurs pas incompatibles, comme le prouve l'arrêt dont je vais vous parler.

Lorsque vous rencontrez votre banquier, celui-ci vous propose, bien évidemment pour votre bien, un certain nombre de produits censés faire fructifier ou tout au moins protéger vos économies.

Parmi ces produits, votre conseiller vous proposera certainement une assurance vous protégeant en cas d'utilisation frauduleuse de votre carte bancaire.

"Vous comprenez, internet n'est pas si sûr que cela et puis un vol, une perte sont si vite arrivés, et puis moi même regardez je l'ai souscrite cette assurance..."

Dans 100 % des cas où je me suis retrouvé dans cette situation, mon banquier a oublié de me parler de l'article L 133-19 du Code Monétaire et Financier.

Je me permets de le retranscrire in extenso, l'ensemble de ces dispositions garantissant assez fortement l'utilisateur d'une carte bancaire de toute utilisation frauduleuse:

"En cas d'opération de paiement non autorisée consécutive à la perte ou au vol de l'instrument de paiement, le payeur supporte, avant l'information prévue à l'article L. 133-17, les pertes liées à l'utilisation de cet instrument, dans la limite d'un plafond de 150 euros.

Toutefois, la responsabilité du payeur n'est pas engagée en cas d'opération de paiement non autorisée effectuée sans utilisation du dispositif de sécurité personnalisé.

La responsabilité du payeur n'est pas engagée si l'opération de paiement non autorisée a été effectuée en détournant, à l'insu du payeur, l'instrument de paiement ou les données qui lui sont liées.

Elle n'est pas engagée non plus en cas de contrefaçon de l'instrument de paiement si, au moment de l'opération de paiement non autorisée, le payeur était en possession de son instrument.

Sauf agissement frauduleux de sa part, le payeur ne supporte aucune conséquence financière si le prestataire de services de paiement ne fournit pas de moyens appropriés permettant l'information aux fins de blocage de l'instrument de paiement prévue à l'article L. 133-17.

Le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d'un agissement frauduleux de sa part ou s'il n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L. 133-16 et L. 133-17"

 C'est ce dernier alinéa qui nous intéresse au regard de la décision de la Cour de Cassation (Commerciale 16/10/2012).

En l'espèce, 2 époux  ont pris l'habitude de conserver leur carte bleue dans la boite à gants de leur véhicule; ce véhicule est bien évidemment laissé sans surveillance la plupart du temps.

Les époux ayant manifestement des problèmes de mémoire, il trouvent solution à ce souci: conserver leur code secret par écrit, écrit qui sera pour des questions pratiques évidentes, placé dans la fameuse boîte à gants.

Ce qui devait arriver, arriva: vol et utilisation frauduleuse de la carte de crédit.

Constatant la disparation, les époux font alors opposition aux retraits opérés frauduleusement, puis assignent leur banque pour obtenir notamment le remboursement desdits retraits.

Les juges du fond, puis la Cour de Cassation, rejettent cette demande.

Est retenu que les époux ont commis en la circonstance une imprudence grave, assimilable à la faute lourde.

Ajoutons pour être complet que le texte actuel, reproduit ci-dessus, n'évoque plus la faute lourde mais la négligence grave.

Cette modification est sans conséquence sur la portée de l'arrêt puisqu'on peut légitimement penser qu'au regard des circonstances, la Cour aurait rendu la même décision en application du texte actuellement en vigueur.

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